L’IDEOLOGIE NAZIE : ses origines

A l’origine de la politique nazie d’expansion et d’extermination, deux idées fondamentales :

  • La supériorité de la race aryenne (das Herrenvolk)
  • L’espace vital (das Lebensraum)

Le nazisme repose sur une conception raciste du monde, inspirée de théoriciens du XIX siècle. Aussi, ne faut-il pas voir “Mein Kampf” comme le point de départ de l’idéologie ayant inspirée le IIIème Reich, mais plutôt comme le réceptacle des théories racistes ou de recherches détournées, forgées au cours des décennies précédentes. 

Arthur de Gobineau (1816-1882)

Une première source d’inspiration, les recherches  d’Arthur de Gobineau qui dans Essai sur l’inégalité des races humaines (1853-1855), estime que le cours de l’histoire du monde est déterminé par la race. Alors que toutes les civilisations sont attribuées aux Aryens, il faut regarder les autres « races » comme « inférieures ». La race blanche qu’il place au sommet de la hiérarchie des races primitives, est selon lui supérieure intellectuellement, mais dénuée d’un principe indispensable à l’épanouissement des civilisations, celui des sensations, qui est « cachée dans le sang des noirs ». Or pour acquérir cette propriété, la race blanche va chercher à se métisser, ce qui a toutefois un envers : il « mène les sociétés au néant auquel rien ne peut remédier »

 

Charles Darwin (1809-1882) 

Théorie de l’évolution des espèces

Charles Darwin écrit en 1859 son œuvre majeure : De l’Origine des Espèces. Il établit la théorie de l’évolution des espèces vivantes, reposant sur les variations aléatoires d’une génération à la suivante suivies de la sélection des individus les plus adaptés à l’environnement. Il applique ce mécanisme à l’évolution de l’humanité, issue d’un long processus de transformation. Il faut souligner que la démarche de Darwin est totalement étrangère au racisme.

Francis Galton (1822-1911)

 L’eugénisme

L’expression “darwinisme social” désigne l’application de la théorie de la sélection naturelle, en principe réservée au monde animal, à la société humaine. De là découle l’eugénisme, terme inventé par le psychologue anglais Francis Galton (1822-1911), cousin de Darwin, visant à favoriser la procréation des groupes humains, considérés comme dotés de qualités héréditaires supérieures, et à éliminer ceux comportant des tares. Il s’agit d’obtenir des lignées « pures ». Georges Vacher de Lapouge (1854-1936), anthropologue et eugéniste français, fait la synthèse de ces idées à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Il exerce une grande influence parmi les adeptes des théories raciales, en particulier en Allemagne, où ses écrits inspirent les théories racistes nazies.

 

Hitler

Les théories du National Socialisme

Le racisme nazi est fondé sur un triple postulat : 

  • Chaque homme appartient à une race ; 
  • Les races sont inégales et hiérarchisables entre elles ;
  •  Une lutte des races est à l’œuvre dans laquelle la plus forte cherche à dominer et détruire celle qui lui est inférieure. 

L’IDEOLOGIE NAZIE : La race et la civilisation

La race aryenne

Selon Hitler, toute civilisation est issue d’une race unique, la « race aryenne »,  qui en s’adaptant à son environnement a créé des civilisations.

« Tout ce que nous admirons aujourd’hui sur cette terre – science et art, technique et inventions – est le produit de l’activité créatrice de peuples peu nombreux et peut-être, primitivement, d’une seule race. C’est d’eux que dépend la permanence  de toute la civilisation. » Il précise également que la disparition des civilisations est liée au métissage.

« Toutes les grandes civilisations du passé tombèrent en décadence simplement parce que la race primitivement créatrice mourut d’un empoisonnement du sang. »

Les trois types d’espèces

Hitler distingue ainsi 3 types d’espèces dans l’humanité :
 

  • Celle créatrice (les Aryens),
  • Celle dépositaire,
  • Celle destructrice de civilisation.

La pureté du sang aryen

Dans le nazisme, le degré de « pureté du sang » constitue un critère essentiel, l’espèce humaine étant, selon ses thèses, dominée par les Aryens, la race des « Seigneurs et des Guerriers », de type scandinave.
On trouve ensuite les peuples d’origine allemande ou anglo-saxonne (Anglais, Flamands…). Viennent ensuite les « races mêlées » tels que les Méditerranéens (Français, Italiens, Espagnols).
Le classement se poursuit jusqu’aux races dites « inférieures », qui comprennent les Arabes, les Asiatiques, les Noirs ou encore les Slaves. Parmi ces groupes qualifiés de « parasites », la race juive est considérée comme la plus dangereuse.
En effet, pour Hitler, ce peuple « n’a jamais pu construire un Etat dans l’espace ». Son existence a toujours été celle d’un parasite d’autres peuples. « Ses armes, ce sont les qualités de finesse, d’intelligence, d’astuce, de sournoiserie, d’hypocrisie.

Purifier la race

Hitler et les nazis considèrent que la « race aryenne » doit être protégée contre les éléments qui lui sont extérieurs, c’est-à-dire ceux dont on estime qu’ils mettent ses qualités biologiques en danger (asociaux, malades, handicapés, alcooliques…), et dont le Reich va décider l’élimination physique (programme T4 d’assassinat par le gaz de 70 000 malades mentaux).

Cette politique eugéniste se double d’une politique d’élimination de tous ceux qui n’appartiennent pas à la race supérieure, au premier rang desquels les Juifs, mais aussi les Tsiganes, les slaves. Elle passe par une exclusion sociale, la privation des droits, la mise à l’écart (camps, prisons), puis la destruction.

La supériorité raciale donne aussi des droits territoriaux, le nazisme justifiant la conquête d’un espace vital (Lebensraum) adapté à la « race aryenne ». 

Diapositive de propagande comparant un jeune métisse (à gauche) à un jeune aryen (à droite)
Library of Congress.

Affiche de propagande nazie mettant en garde les Allemands sur les dangers que représentent les “sous-hommes” d’Europe orientale. Allemagne, date incertaine.(Encyclopédia multimédia de la Shoa)

L’IDEOLOGIE NAZIE : La notion d’espace vital (Das Lebensraum)

Situation de l’économie allemande

Afin de bien comprendre dans quel contexte naît le concept d’espace vital, il faut se replonger dans la situation économique de l’Allemagne, lors de la naissance du IIIème Reich.

Les conséquences du Traité de Versailles :

Les amputations de territoires imposées par le Traité de Versailles rendaient plus difficiles pour l’Allemagne de s’approvisionner à l’intérieur de frontières rétrécies alors qu’en même temps sa population ne cessait d’augmenter. Les pertes correspondaient à 75 % de sa production de fer, 26 % de sa production de plomb et à 7 % de ses entreprises industrielles. Elle ne disposait plus désormais des régions à l’agriculture excédentaire qu’étaient la province de Prusse-Occidentale et la province de Posnanie (actuelle Pologne). Tant que le commerce mondial ne fut pas atteint, il resta possible de satisfaire les besoins par les importations en produits agricoles et en objets manufacturés, mais la crise économique mondiale qui éclata en octobre 1929 eut pour conséquence de rendre plus difficile le commerce international.

 

La crise de 1929
 Le commerce international diminua fortement et la baisse du volume d’affaires dans le monde réduisit les exportations et entraîna une hausse du chômage. La perte du pouvoir d’achat qui en résulta conduisit à une baisse de la demande intérieure, avec pour résultat un accroissement du chômage. En 1932, le chômage atteignit son point culminant, avec plus de six millions de chômeurs et au moins huit millions de travailleurs sans travail à temps plein. Des réformateurs, comme on les appelait, constatèrent l’échec de la conception libérale d’une économie mondiale qui se serait régulée d’elle-même par le jeu de l’offre et de la demande. 

 

La notion d’espace vital (Lebensraum) 

La notion d’espace vital nécessaire à l’Allemagne, énoncée dès 1920, comprend l’acquisition des nouveaux territoires pour nourrir la nation et pour y installer l’excédent de la population.

Les « réformateurs » imaginaient une union avec les États baltes, l’Autriche, l’Europe de l’Est et des Balkans. Cette zone, dont les contours pouvaient varier, était désignée sous le nom d’Europe du Centre. À l’intérieur de cet espace, produits agricoles, matières premières et produits manufacturés devaient être échangés en franchise de droits de douane, la production étant contrôlée par l’État. Bien sûr la prééminence reviendrait à l’Allemagne. Il n’y aurait plus d’économie mondiale mais des économies sur de vastes zones. L’idée de la planification et de l’autarcie qui permettrait de résoudre les crises futures commença à se répandre de plus en plus.

L’espace devant revenir au Reich selon les Nazis. Wikipédia

L’IDEOLOGIE NAZIE : La vision économique

La pensée économique nationale-socialiste était définie par deux maximes.

  • La première stipulait la prédominance absolue de la politique par rapport à l’économie. La politique définissait les objectifs de l’économie et ordonnait, si nécessaire, ses procédés.
  • La seconde maxime se résume dans l’idée d’autarcie. L’autarcie est le contraire de la division du travail au plan de l’économie mondiale. Cela veut dire que l’économie d’un territoire donné est en mesure de satisfaire par ses propres forces les besoins matériels de ce territoire. L’Allemagne devait, selon les idées et la volonté des nationaux-socialistes, disposer d’une économie autarcique.

La notion d’autarcie était, bien entendu, absurde, si elle se référait à l’Allemagne dans ses frontières de 1933, l’Allemagne étant loin de produire assez de den­rées pour donner assez à manger à sa population et manquant de presque toutes les matières premières indispensables à sa production industrielle. Pour vivre en autarcie, elle devait disposer d’un grand espace économique européen qu’elle dominerait. Aussi, l’idée de vivre en autarcie était-elle liée à l’exigence d’un « espace vital » et en conséquence d’un expansionnisme agressif. Les allemands, à commencer par l’élite SS devaient être des soldats-fermiers occupant et faisant fructifier l’espace qui leur revient de droit naturel, réalisant une colonisation agraire à l’est, permettant dans le même temps de restaurer la germanité dans ces territoires.

Économie, réarmement et guerre se situaient dans un réseau interactif et se justifiaient mutuellement. La notion d’autarcie économique était l’une des motivations de la volonté de guerre nationale-socialiste et explique la mise en place d’une « économie de guerre » pour la préparer, puis pour la mener.

L’État achetait en masse et de plus en plus des biens d’équipement militaire en payant des prix porteurs. Cela suscita aussitôt chez les entreprises privées des prévisions de vente optimistes et des perspectives de profits avantageux, les incitant à fabriquer les produits réclamés. Lorsque la production exigeait de nouveaux développements techniques et de lourds investissements en capitaux, il pouvait arriver qu’elles hésitent et se fassent prier quelque peu. Les coûts et les risques rendaient leur décision difficile. Dans ce cas, l’État leur venait en aide par des garanties de ventes et de prix, ainsi que des crédits favorables. Parfois il prenait même en charge une partie des coûts de développement et des dépenses d’investissement. Voilà le sens du terme d’intervention conforme aux conditions du marché. L’État n’imposait pas de décisions aux entreprises ; il leur proposait la décision qu’il souhaitait en modifiant les données de la décision à l’avantage des entreprises.

Il vient d’être dit que les entreprises hésitaient parfois, pour des raisons de gestion, à lancer ou à développer la production de biens militaires, mais elles n’hésitaient guère pour des raisons de morale politique à produire des biens militaires. Au contraire, lorsque ces commandes leur permettant de remplir les caisses, ils en réclamaient. Cela justifie leur coresponsabilité pour la guerre et les horreurs qui y sont liées.

Carte postale extraite de Groarke 2015.

Friedrich Flick, industriel, lors de son jugement au procès de Nüremberg. Il sera condamné à 6 ans d’emprisonnement, n’en fera que 3 et deviendra l’homme le plus riche d’Allemagne de l’Ouest

Affiche de propagande pour que les ouvriers votent pour Hitler.

Voyons les conséquences de cette idéologie dans ce qui deviendra la ville d’Auschwitz : Lien vers D’Oswiecim à Auschwitz

Sources

Le racisme, socle du nazisme, reseau-canope.fr

Yves Ternon, L’influence des hygiénistes raciaux sur l’élaboration de Mein Kampf, Revue d’histoire de la shoah 2018, n°208

Le « Lebensraum », la quête d’un espace vital, http://www.encyclopedie.bseditions.fr

ttps://les-yeux-du-monde.fr/pays-indus/9805-le-systeme-economique-nazi-12/

Hitler, Mein Kampf

Volker Hentschel , Traduction de Gérard Schneilin,  L’Économie du Troisième Reich, https://books.openedition.org/psn/5811?lang=fr