Du camp de concentration au camp d’extermination
En effet, c’est un camp de concentration, dans la mesure où des individus, qualifiés par le pouvoir de potentiellement dangereux, y sont incarcérés, la plupart du temps en masse , dans le but de les extraire de la société, voire de les éliminer.
C’est également un centre d’extermination, c’est à dire est un endroit où un peuple, dont on ne souhaite pas la présence physique, est assassiné de manière immédiate, délibérée et préméditée, dans une infrastructure spécialement prévue à cet effet.
La mise en place du plus grand camp d’extermination de juifs
C’est à partir de 1942 et de la mise en place de la “Solution finale”, qu’Auschwitz devint le premier camp d’extermination de juifs. Il prit une échelle industrielle à Auschwitz-Birkenau.
Premières expérimentations de gazage sur les prisonniers soviétiques
Colonne de prisonniers soviétiques du front ukrainiens en 1942. (Source : Documentation française)
“Pendant un de mes voyages d’affaires, mon suppléant, le Schutzhaftlagerführer Fritzsh fit usage du gaz pour les (prisonniers soviétiques) tuer. Il employa à cette fin une préparation d’acide cyanhydrique, “Zyklon B”, dont il avait une provision suffisante, car on l’utilisait constamment au camp comme insecticide. Fritzsch m’en rendit compte après mon retour et pour le convoi suivant on utilisa de nouveau le même gaz. Le gazage fut opéré dans les cellules d’arrestation du bloc 11. Protégé par un masque à gaz, j’ai observé leur mise à mort. Dans les cellules entassées, la mort suivait immédiatement le jet de gaz. Un cri très bref, déjà presque étouffé et tout était fini.”
Rudolf Höss
(Source : Rudolf Höss, Le commandant d’Auschwitz parle, éditions La Découverte.)
Bloc 11 d’Auschwitz 1 où eurent lieu les premiers essais du gazage sur les soldats soviétiques.(Source : Photo de Patrick Nguyen)
La sélection des juifs sur la rampe d’Auschwitz
On leur intimait l’ordre d’abandonner sur le quai leurs biens. Un “kommando” avait alors pour mission de ramasser les biens et de les acheminer vers des lieux de stockage. Un deuxième récupérait la nourriture que les déportés avaient apporté avec eux, pour la remettre aux cuisines du camp.
C’est alors qu’intervenait la sélection à proprement parlé. On établissait deux files en moins de 10 minutes : l’une dans laquelle on ne conservait que les juifs en état de travailler, alors que tous les autres, considérés comme inutiles (personnes âgées, femmes avec enfants, enfants), étaient directement envoyés dans les chambres à gaz.
La sélection
Sélection de juifs hongrois1942. (Source : Documentation française)
« Tout s’est passé relativement vite. Comme je l’ai dit, on n’avait pas le temps de penser. Dans ces situations, on se sent déboussolé, hors du monde. Les Allemands nous encerclaient avec des mitraillettes et des chiens. Personne ne pouvait sortir du rang. (…) Ils nous ont mis tout de suite en file, devant un officier allemand. Un autre officier est arrivé peu après. Je ne sais pas s’il s’agissait du fameux Dr Mengele, c’est possible, mais je n’en suis pas sûr. L’officier nous regardait à peine et faisait un geste avec son pouce indiquant “Links, rechts !” “Gauche, droite !” et selon la direction qu’il nous indiquait, on devait aller d’un côté ou de l’autre. » En moins de dix minutes, je me trouvai faire partie du groupe des hommes valides. Ce qu’il advint des autres, femmes, enfants, vieillards, il nous fut impossible alors de le savoir : la nuit les engloutit, purement et simplement.”
Shlomo Venezia, Sonderkommando. Dans l’enfer des chambres à gaz, Albin Michel.
L’entrée en camp de concentration
Les arrivants doivent se déshabiller, puis se ranger par ordre alphabétique. Un matricule leur est attribué. Ils sont enregistrés et une fiche est établie pour chacun. Les renseignements consignés concernent l’état civil, une description anthropomorphique, des enseignements sur le niveau d’études, langue, compétences ;…, les raisons de l’arrestation et les antécédents éventuels. Jusqu’en 1943, l’enregistrement s’accompagne de photographies face/profil/trois quart des détenus. Chacune des étapes de cet enregistrement est réalisée par les détenus membres de l’Aufnahmekommando, sous la surveillance de SS, dont les médecins, qui peuvent extraire des détenus dont l’état physique est jugé insuffisant et qui sont envoyés à la mort.
Le déporté reçoit alors un numéro d’immatriculation composé d’un numéro et d’un symbole indiquant le motif de présence dans le camp (juif-étoile de David, prisonnier politique -triangle rouge, prisonnier de droit commun- triangle vert, apatride : triangle bleu, tzigane- triangle marron, homosexuels-triangle rose, témoins de Jéhovah- triangle violet, asociaux -triangle noir, rond noir – compagnie disciplinaire).
Les femmes et hommes nus ont le corps rasé, la tête tondue, sont désinfectés, puis passent sous une douche glacée. Intervient ensuite le tatouage, sur l’avant-bras gauche, qui finalise l’enregistrement et l’entrée au camp. Il n’y a qu’à Auschwitz où un numéro est tatoué sur la peau.
A la fin de l’opération les déportés reçoivent la tenue rayée, leur « pyjama », le symbole qui devait y figurer , un calot et des sabots.
Les juifs inutiles (les personnes âgées, les femmes, les enfants, les malades) sont emmenés vers les chambres à gaz.
La sélection
Enregistrement du Père Kolbe exposée à Auschwitz (Photo de Patrick Nguyen)
Vêtement de détenu (Source : Encyclopédie Multi média de la Shoah)
Calot de détenu (Source : Encyclopédie Multi média de la Shoah)
L’extermination des juifs
Ces “bains”, qui étaient situées au sous-sol des fours crématoires, avaient l’aspect de douches. Les victimes étaient conduites dans une espèce d’antichambre, où elles apercevaient des bancs et porte-manteaux numérotés. Les SS leurs remettaient un savon sur lequel était écrit « savon pour juif ». Ils invitaient les juifs à se déshabiller, à déposer leurs vêtements et chaussures ensemble, tout en leur signifiant de bien retenir leur numéro, pour les récupérer après la « douche ». L’objectif de ce discours était de rassurer les victimes.
Lorsque tout le monde était rentré dans la chambre à gaz, un ordre rauque ordonnait au SS et commando de quitter la salle. Les portes se refermaient et les lumières s’éteignaient. Un sous-officier arrivait avec des boites de Zyklon ; Par des courtes cheminées de béton, après s’être muni d’un masque à gaz, il ouvrait une boite et déversait son contenu dans l’ouverture de la cheminée. Au contact de l’air, ces granulés se transformaient en gaz. En 5 minutes, tout le monde était tué. 20 minutes après, on mettait en marche les appareils d’aération électrique, pour évacuer le gaz. Les portes s’ouvraient. Les cadavres étaient retrouvés entassés sous toute la hauteur de la pièce, les malheureux s’étant piétinés pour trouver de l’air dans la partie haute de la pièce. A la base de cette pile humaine on trouvait les cadavres des bébés, enfants et femmes, au sommet ceux des plus forts.
Maquette montrant le fonctionnement d’une chambre crématoire- Auschwitz 1 (Source http://www.encyclopedie.bseditions.fr)
Chambre à gaz d’Auschwitz 1 (Source : Photo de Patrick Nguyen)
Gaz Zyklon d’Auschwitz 1 (Source : Photo de Patrick Nguyen)
L’extermination des juifs : témoignages de “sonderkommando”
Les témoignages de Slomo Venezia et de David Olère montrent combien s’était rationalisée cette entreprise de mort dans le camp d’Auschwitz -Birkenau
Plan d’une chambre à gaz d’Auschwitz-Birkenau – David Olère
Pour les déportés sélectionnés, comment se déroulait la vie dans le camp ? Lien vers la vie dans le camp.
Après le gazage- David Olère – 1946
Témoignage de Shlomo Venezia
(L’ouverture d’une chambre à gaz) c’était une vision d’horreur. (…) Quand le Zyklon B était déversé, les gens mettaient cinq, dix, douze minutes à mourir. Comme les cristaux jetés au sol dégageaient de l’acide par le bas, les plus forts grimpaient sur les autres pour tenter d’avoir un peu d’air. Quand on ouvrait la porte et que l’on enclenchait la ventilation, c’était un spectacle de corps agrippés, entrelacés, enchevêtrés. (…)Sang, excréments, urine, vomi… (…)` Pour dégager les corps, on utilisait des cannes, (…) Parfois, on utilisait des ceintures, comme on le voit dans les dessins du peintre David Olère, l’un de mes compagnons là-bas.
Source : Migros Magazine 36, 3 septembre 2007
Sous-Commando des écraseurs d’os- David Olère
Dans la salle des fours – David Olère – 1945 Témoignage de Shlomo Venezia
de faire glisser plus facilement les corps vers l’un des cinq fours, équipés chacun de trois moufles. On y déversait les corps deux par deux, tête-bêche sur un brancard métallique. Il y avait trois hommes devant chaque moufle.
Un de chaque côté du brancard. Le troisième tenait les manches, avançait rapidement le brancard en le soulevant pour faire glisser les corps.
Source : Migros Magazine 36, 3 septembre 2007
La flamme éternelle- David Olère
Témoignage de Shlomo Venezia
le sol et les murs de la chambre à gaz, pour le convoi qui arrivait.
Source : Migros Magazine 36, 3 septembre 2007
Sources
- Le quotidien des sonderkommandos : http://www.sonderkommando.info
- Diaporama sur l’œuvre de David Olère : https://slideplayer.fr
- La shoah : https://histographie.net/
- Auschwitz, l’horreur par ceux qui l’ont créée, éditions jourdan
- Tal Bruttmann, Auschwitz, éditions La découverte.
- Léon Poliakov, Auschwitz, Folio histoire.
- Primo Levi, Si c’est https://www.yadvashem.org/yv/fr/expositions/album-auschwitz/derniers-moments.asp un homme, éditions Poche.
- Entretiens, nous vidions les chambres à gaz, Migros Magazine 36, 3 septembre 2007L’album d’Auschwitz , Yad Vashem : https://www.yadvashem.org/yv/fr/expositions/album-auschwitz/derniers-moments.asp